Cystotomie vidéo assistée chez un chien atteint d'obstruction du bas appareil urinaire
Cystotomie vidéo assistée chez un chien atteint d'obstruction du bas appareil urinaire
A propos d'un cas clinique
Publication dans le prochain l'Essentiel par Flora GOLLAIN, Jean-François BOURSIER et Aurore FOUHETY
A propos d'un cas clinique
Publication dans le prochain l'Essentiel par Flora GOLLAIN, Jean-François BOURSIER et Aurore FOUHETY
La cystotomie vidéoassistée est une technique mini-invasive qui représente une alternative aux techniques classiques. Elle répond à plusieurs indications comme le retrait de calculs en petit nombre présents dans le bas appareil urinaire, à l’exemple du cas décrit ici.
Anamnèse
Un chien mâle entier bouledogue français de 4 ans est présenté en consultation d’urgence, référé pour une obs- truction des voies basses urinaires. Les premiers symptômes de troubles urinaires et mictionnels sont apparus quelques jours auparavant. Le chien présente depuis le matin des efforts pour uriner, se met en position, mais aucune urine ne semble s’écouler.
Examen clinique
L’examen général à l’admission révèle une température rectale dans les normes, une auscultation cardiorespira- toire normale et la mise en évidence d’une légère douleur abdominale à la palpation, ainsi qu’une vessie distendue, de consistance ferme, et douloureuse à la légère palpation- pression. Un début de globe urinaire est constaté.
Une atteinte clinique d’obstruction du bas appareil urinaire est ainsi confirmée.
Légendes : Figure 1 : Radiographie de profil réalisée lors du sondage urinaire. Noter la présence de deux calcifications, de forme arrondie, correspondant à des urolithiases du bas appareil urinaire, à l’origine de l’obstruction au niveau de l’os pénien.
Examens complémentaires
L’analyse sanguine montre une azotémie modérée et l’ionogramme révèle une légère hyperkaliémie, indiquant un début de répercussion rénale.
L’examen radiographique abdominal est réalisé selon plusieurs incidences : une vue de face ventrodorsale, une vue de profil avec les postérieurs en extension et une vue avec les postérieurs en traction crâniale (Fig. 1). Cet examen révèle la présence d’une obstruction de la lumière urétrale, en amont de l’os pénien, obstruant ainsi les voies urinaires basses. Ces calcifications intraluminales sont compatibles avec des calculs urétraux. Aucune anomalie n’est visualisée dans la lumière vésicale.
Une vidange par cystocentèse est réalisée en urgence, et le chien est placé sous perfusion jusqu’à normalisation de la kaliémie. Il est alors anesthésié afin de placer, en urgence, une sonde urinaire à demeure. Cet acte nécessite alors une hydrorétropulsion des calculs urétraux sous anesthésie. Une fois les calculs repoussés dans la vessie, la sonde urinaire est fixée au fourreau et laissée à demeure pendant 24 heures.
L’échographie abdominale, et plus particulièrement de la vessie, n’a pas montré d’autres calculs urinaires ni d’autre lésion. Une vidange de la vessie est réalisée a minima 4 fois par jour, via la sonde.
Intervention chirurgicale
Compte tenu de la présentation clinique et du diagnostic d’imagerie, une intervention chirurgicale est décidée après stabilisation et réanimation médicale de l’animal. Les deux calculs sont alors retirés par cystotomie vidéoassistée. Cette intervention chirurgicale consiste à réaliser une m nilaparotomie parapénienne droite, à extérioriser la vessie et insérer un scope de 4 mm au niveau de l’apex de la ves- sie permettant la visualisation directe des calculs (Fig. 2). Une pince est également insérée dans la vessie, permettant ainsi la préhension et le retrait des calculs sous contrôle vidéo direct (Fig. 3). Après le retrait des calculs, le scope est introduit dans l’urètre afin de vérifier l’absence d’autre calcul urétral (Fig. 4).
Une hydrorétropulsion est également réalisée pendant l’intervention chirurgicale. La vessie est alors refermée par un point en X au monofilament résorbable (déc. 3). Un rinçage abdominal est ensuite réalisé au liquide physio- logique stérile tiédi, puis l’abdomen et le tissu sous-cutané et cutané sont refermés de manière conventionnelle.
Légendes : Figure 2 : Image enregistrée lors l’introduction du scope de cystotomie vidéoassistée : visualisation directe du calcul. Figure 3 : Retrait du calcul par une pince introduite dans la vessie, sous visualisation vidéo directe. Figure 4 : Image en fin d’intervention, montrant la possibilité d’explorer l’urètre, sans augmenter la taille de l’incision de la cystotomie, et ainsi vérifier l’absence de calculs restants.
Discussion
Prévention des calculs de cystine
Un régime conçu pour prévenir la réapparition de cristallurie de cystine doit avoir une teneur réduite en acides aminés soufrés, une supplémentation en taurine et une capacité à produire un pH urinaire neutre. La cystéine est un acide aminé précurseur de la synthèse de taurine, ainsi, la cystinurie pourrait entraîner une déficience en taurine, nécessitant donc une supplémentation. Maintenir une densité urinaire inférieure à 1,020 et, si possible, augmenter la consommation hydrique chez le chien peuvent être des objectifs d’une prise en charge alimentaire.
Le risque de récidive est élevé lors de calculs de cystine. Ceux-ci sont présents fréquemment chez des chiens d’âge variable, de 2 à 7 ans, dont la moyenne est à 5 ans environ. Les mâles sont surreprésentés, avec une prévalence de 90 % environ. Ces critères correspondent à la description de notre cas.
Ces types de calculs se retrouvent dans une urine acide ou neutre, sans pour autant être forcément associée à une infection urinaire. Les calculs de cystine sont radiographiquement visibles, bien qu’ils soient moins radio-opaques que des calculs d’oxalate de calcium, par exemple.
Prise en charge thérapeutique
Dans certains cas, notamment lors de calculs potentielle- ment dissolubles, une dissolution médicale est à recom- mander en première intention. Lors de présence ou de suspicion de calculs de struvite, par exemple, le traitement de l’infection urinaire est indispensable afin d’obtenir une issue favorable et doit être couplé à la gestion médicale. Dans notre cas, une approche chirurgicale a été préconisée en première intention après la stabilisation, compte tenu du risque de réobstruction après le retrait de la sonde urinaire, et surtout après discussion et consentement éclairé auprès des propriétaires.
Dans ce contexte, la présence des deux seuls calculs a justifié la réalisation d’une cystotomie vidéoassistée.
Cystotomie vidéoassistée
Cette intervention permet une approche peu invasive, tout en garantissant une meilleure visualisation, et ainsi un bilan lésionnel plus complet qu’une approche classique de cystotomie. Comme toutes les techniques minimalement invasives, celle-ci apporte une meilleure récupération postopératoire et permet de diminuer la morbidité associée à des techniques plus conventionnelles. En effet, les animaux nécessitent des injections d’analgésiques moindres dans le cas de cystotomie vidéoassistée que dans le cas de cystotomies classiques. En outre, la durée d’hospitalisation postopératoire est significativement moins longue. En effet, la cystotomie vidéoassistée permet de réduire la taille de l’incision autant de l’abdomen que de la vessie (Fig. 5).
Cet examen permet également d’améliorer la visualisation grâce à la magnification liée à l’utilisation de la vidéo et de scope de qualité haute définition, permettant ainsi l’identification et le retrait de calculs millimétriques (Fig. 6). L’introduction du scope dans la vessie et dans l’urètre
Légendes : Figure 5 : Images comparatives de deux techniques de cystotomie. A gauche une cystotomie conventionnelle nécessitant une incision large de la vessie pour explorer toute sa lumière. A droite, une cystotomie vidéoassistée ne nécessitant qu’une cystotomie de quelques millimètres. Figure 6 : Image de cystotomie vidéoassistée en fin d’intervention. Noter la possibilité de visualiser des calculs millimétriques par cette technique, et le retrait sous contrôle visuel direct. Figure 7 : Image d’une cystotomie vidéoassistée réalisée sur un cas présenté en urgence pour une réobstruction quelques jours après une cystotomie conventionnelle. Noter la présence de calculs millimétriques dans la vessie, rétropulsés par une sonde urinaire.